J'ai été témoin d'une d'entre elles par un soir froid d'automne. Un soir qui avait glacé le sol et mit de la neige sur l'herbe et dans les champs.
Cette aberration, comme c'est souvent le cas, porte un nom, la mort.
La mort d'une femme.
Qui est l'enfant d'une autre femme.
Qui est la soeur d'une autre femme aussi...
Qui est la mère d'une autre femme en devenir.
La mère aussi d'un enfant, presqu'un homme. Qui les larmes aux yeux embrassait sa douce devant sa mère, qui comme ça, semblait dormir.
Figée et trop maquillée pour la circonstance.
Mon regard, mon coeur plutôt c'est porté bien plus sur la petite fille, ce petit bout de chou qui semblait vivre en dehors de son corps, en dehors de tout ce qui se déroulait dans ce salon funéraire.
Des joues roses, presque blanches, des taches de rousseurs et des yeux magnifiques.
Des yeux d'enfants qui recherche l'amour, qui veut et souhaite à tout prix un peu d'attention. Et qui veut rire.
Ce petit bout de fillette, qui sera bientôt grande est venue me toucher en plein coeur.
Quand de son sourire et de ses rires elle est allé chercher sa grand-mère, a sauté en dansant un peu, pour enfin se blottir très fort dans ses bras.
Dans tous les gestes il y avait cette supplication : "garde moi très fort près de toi."
...
Puis.
Dans un geste enfantin et doux et beau, elle s'est assise sur le cercueil de sa mère, comme on le fait sur le bord du lit quand on veut embrasser les dormeurs.
Elle a regardé sa mère, je ne voyais pas ses yeux, je ne voyais que son profil, que sa gorge qui bougeait, nouée peut-être...
Et j'ai vu ses mains de petites filles caresser les mains de sa mère.
Et puis zou. Elle a sauté en bas du cercueil et s'en est allé vers des bras bien vivants, des bras bienveillants....
Cette enfant, orpheline.
À jamais.
Elle l'était (et c'est probablement ce qui me touche tant...) bien avant que sa mère ne meurt. Cette petite fille vit dans un foyer d'accueil depuis un bout déjà.
Sa mère pour elle est partie depuis longtemps.
Mais maintenant elle est partie pour vrai.
Aucune possibilité de retour.
Ce n'est plus un jeu de cache cache avec la vie.
La possibilité du retour vers le sourire natal, vers les bras qui l'ont bercés tout bébé ne sont plus.
...
Existe-t-il une bonne nouvelle lorsque l'on perd sa mère si jeune ?
Peut-être...
À partir de maintenant, qu'elles que soient ses défauts, ses talents ou ses pires manquements, cette femme, sa mère, fera partie de la légende de sa vie.
Dès à présent, ce petit bout de chou, pourra magnifier les souvenirs et se faire une mère plus grande que nature.
...
Je pense à elle constamment depuis ce soir si froid.
J'ai été touchée en plein coeur.
Et quand le coeur est touché....
...
N'est-ce pas ?