07 mai 2012

fanées

J'aime les pétales de fleurs, qui, lorsque fanées, deviennent si minces, si fragiles qu'on n'ose bouger le pot qui les accueille. Lorsque la couleur initiale, laisse place à la transparence.
Je n'ose jeter ces fleurs trop vieilles. Elle m'émeuvent. Me font penser à ses vieilles dames que je rencontre sur la rue le matin, au retour de leur messe. Parfois souriantes, parfois très graves, toujours bien mise.

À une amie fleuriste, qui me fait de si beaux bouquets, je dis souvent que j'aime bien voir les fleurs dans leur déclin. Elle rigole à toutes les fois, me disant que des clientes comme moi, elle devrait en avoir plus! Je la soupçonne pourtant de me choisir des fleurs qui "fanent bien"...
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Ces fleurs fanées qui portent leurs pétales, comme les ballerines leur jupe en taffetas, fières. 
Et je pense à ces vieilles qui font partie de l'histoire de ma vie. À Simone, ma grand-mère toute en chair et moelleuse comme du gâteau à la vanille. Elle sentait sucrée comme les bonbons qu'elle mettait dans des petits plats dans le salon. Son appartement sentait la nourriture et on y ressentait le temps qui passe lentement. Il ne fallait pas être pressé tout à côté d'elle. Et puis un jour, trop vite, elle est partie. Partie bien avant de mourir. Plus d'appartement et plus de souvenirs non plus. Elle se berçait dans une chambre dans un mouroir centre de soins longue durée, Je me souviens de ses yeux tristes, triste de la tristesse de ne plus reconnaître les gens qui l'entourent, triste de la peine de se sentir si perdue.
Je pense aussi à tante Lili. Si droite, si fière. Qui a 86 ans peinture seule son appartement et qui se targue de pouvoir manger par terre, tellement son plancher est propre. Qui cuisine divinement bien et qui n'oublie rien du tout! Exigeante et généreuse. Quand je la regarde les yeux si vifs et le rire si présent, quand je vois sa peau si fine maintenant, que j'ai peur de la serrer trop fort dans mes bras... J'ai peur à toutes le fois, que ce soit la dernière fois. La vie de famille ne sera plus la même sans elle. 
À Rita qui dernièrement, m'a avoué penser qu'Il l'a oublié "en haut"... Elle attend la mort comme une délivrance d'une vie trop longue. Elle l'a aimé la sa vie, mais elle commence à la trouver longue. Il faut dire qu'à 91 ans, elle en a vu des révolutions, des évolutions et des stagnations. À cet âge, les gens qu'elle aime, ses amis, ses frères et ses soeurs, sont morts. Il lui reste les enfants, les petits enfants. Mais on sait comment c'est... Ils vivent leur vie et sont pressés. Elle qui a tout son temps. Heureusement il y a son chat et "father" encore là aussi, pour lui offrir un petit verre à 17h00 tous les soirs...
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Un jour aussi, j'espère, ma peau se fanera doucement. Mes yeux seront brillants et je serai fière d'être debout, parmi les miens. Je souhaite me faner en beauté, en luminosité et de savoir encore comment les gens que j'aime se nomme et bercer mes arrières petits enfants en racontant l'histoire incroyable, de cette vie qu'aura été la mienne.


1 commentaire:

Anonyme a dit…

C'est formidablement beau ma poétesse!
Les pétales fanés ou toniques sont un tel plaisir
pour tes sens que jamais je ne te laisserai sans en
admirer des loufoques ou des sages.

Quelle artiste somptueuse tu es!

La fleuriste-animatrice